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Le francoprovençal est une belle langue. Bien que ne la parlant pas , ne la comprenant pas, je reste sensible à sa musicalité lorsque les -trop rares- occasions de l'entendre se présentent. Cette langue, vulgairement surnommée patois, parlée par mes grand-parents, m'a bercée durant mon enfance. C'est pourquoi j'ai envie de la mettre à l'honneur sur ce blog. Je mettrais en ligne petit à petit les textes qu'écrivit mon grand-père Donat et que vous connaissez déjà pour les avoir lu en français.
Histoires maintes fois racontées et publiées dans la Revue Dava Rossan-na en français et en patois sous le nom d'auteur Dona Revène – Le Marmotïn – Moulïn - Péjèy

Retrouvez-les dans les archives 2015-décembre

lundi 24 janvier 2011

Donat Silvin nous a quitté...


Donat était un grand monsieur connu de tous dans la Vallée de Peisey. On le surnommaitamicalement " la mémoire vivante de la vallée ". Il était très impliqué dans la vie de sa commune et a exercé de nombreuses fonctions: agriculteur, trésorier de le régie communale des remontées mécaniques... En plus de tout cela, il ne manquait pas une occasion de passer saluer le personnel et surtout ne ratait aucun pot d'accueil où il poussait la chansonnette aux touristes... Claudette de l'Office du Tourisme, une amie de longue date se souvient de bons moments passés avec lui... "Il m'appelait " sa voisine " qui habite le petit Nice de Landry. Je lui rendais souvent visite et il me servait son excellent vin au serpolet et me racontait des histoires de l'ancien temps et moult anecdotes sur la création de Plan-Peisey... "; Donat était une " figure " de la vallée, il laisse un grand vide derrère lui.
" Arriévè " Donat!

© Office du Tourisme Peisey-Nancroix (2007)

Bretagne Savoie


Pour mieux connaître nos frères
Des montagnes de Savoie,
Quelques amis décidèrent
D'aller à Peisey-Nancroix.
Par un beau dimanche d'été,
Jour de liesse et de gaieté,
Nos deux villes se sont jumelées,
Et ensemble on a chanté.

REFRAIN

Chantons filles et garçons,
Pour Roscanvel et sa fête,
Chantons filles et garçons,
Pour Peisey et ses chansons.


Pour fer le jumelage,
De Roscanvel et de Peisey,
On a dansé au village,
Près du fort et sur le quai,
En gardant la tradition,
Comme au jour du grand pardon,
Savoyards et Bas-Bretons
Ont chanté cette chanson.


Dès le printemps, sur nos plages
Arrivent des écoliers
Pour s'initier à la nage
Ou à la barre d'un voilier.
Par nos landes et nos vallées,
A bicyclette ou à pied,
Souvent, on les voit passer,
Et on les entend chanter.


On quitte mer et falaise,
L'hiver, quand le temps est froid,
Pour aller en classe de neige
Toujours à Peisey-Nancroix.
Nos enfants sont très heureux
De skier sous le ciel bleu.
Ils reviennent plein d'entrain,
fredonnant notre refrain.



Pépé et Mémée avaient été parmis les premiers Peiserots à se rendre à Roscanvel en 1976

Recettes


Vin de serpolet
Cueillir des fleurs de serpolet à la floraison, en juin ou juillet; les meilleures sont les rose-foncé. Remplir de fleur un bocal du litre et bien tasser. Ajouter de l'eau de vie à 40° jusqu'au sommet. Boucher et laisser macérer 50 jours. Ensuite mélanger avec 6 litres de vin blanc sec à 12° et un kilo de sucre. Au bout de 10 jours, filtrer et mettre en bouteille. Laisser vieillir plusieurs mois.

Vin de gentiane
Arracher fin octobre les racines de la grande gentiane jaune, les laver, les éplucher et les couper en tout petits cubes. Remplir un bocal du demi-litre avec un quart de litre de ces cubes et un quart de litre d'eau de vie à 40°. Laisser deux mois puis mélanger avec cinq litres de vin blanc sec à 12°, un kilo de sucre et encore un demi-litre d'eau de vie. Laisser vieillir plusieurs mois, filtrer et mettre en bouteille.

Liqueur de genépi
Dans un litre d'eau de vie, mettre 40 tiges de genépi, 40 morceaux de sucre et laisser macérer 40 jours (avant de consommer). On peut aussi laisser le genépi dans la bouteille...
 

Donat, ses histoires!


La vache

Après la guerre de 14, il y avait à Peisey une petite bande d'hommes qu'on appelait les "Rouges", politiciens radicaux dont plusieurs étaient revenus de Paris avec des idées avancées.
Parmi eux, un nommé Gal, très excité contre les curés. Il ne manquait pas une occasion pour le faire voir, surtout par des moqueries contre les "calotins".
Le jour de la Fête-Dieu, la procession descendait par la rue principale jusqu'au Romonard, petite place à l'entrée du village, près de la poste, où un riche " bronzier de Peisey " s'était fait construire une grande maison bourgeoise au milieu d'un grand jardin. Elle était clôturée d'un mur de pierres de taille surmonté d'une grille en fer forgé encore visible aujourd'hui, le tout de deux mètres de hauteur.
Gal avait une vache et il avait pensé de rentrer du pâture (revenir d'en champ) à l'heure où la procession arriverait sur la place pour pertuber la fête. Au moment où le curé qui portait l'ostensoir sous le dais, porté par 4 hommes et accompagné par la foule qui chantait des cantiques, arrivait sur la place, Gal arriva avec sa vache. Il la fit avancer vers le dais en lui donnant un bon coup de bâton sur le cul.
Mais la vache, affolée par tout cet attirail et choquée par le coup reçu, se détourne du dais et, chose incroyable, bondit en l'air si violemment qu'elle passa par-dessus la grille sans s'accrocher sur les pointes.
Tous les témoins, dont mon père, ont pensé à un miracle et se sont moqués de Gal qui restait là, tout penaud, en attendant que la procession remonte à l'église. Ensuite, il a appelé le gardien afin qu'il vienne ouvrir la porte en fer pour reprendre sa vache.Depuis ce moment-là, Gal ne se montrait plus en public, pour ne pas se faire lancer des quolibets, ce dont personne ne se privait...

L'éclair

Quelques années plus tard, Gal était parti avec un voisin, au mois d'août, à l'alpage de la Sevolière, au pied du Mont pourri, pour voir sa vache. Il fallait deux heures de marche pour y arriver, et il fallait surtout choisir un jour de beau temps. Tout s'était bien passé jusqu'au début de l'après-midi. De gros nuages sont apparus vers le fond de la vallée.
Nos deux compagnons ont décidé de redescendre plus vite que prévu. Ils n'avaient pas emporté d'abri. Comme il arrive souvent en montagne, le ciel s'est vite assombri et Gal s'est mis en colère en jurant.. L'orage s'approchait et ils venaient de traverser un mauvais passage sur un chemin creusé dans la roche.

Ils décident alors d'aller se mettre à l'abri sous une "barme" (petite caverne). Une fois abrités, Gal se remet à jurer, et comme s'il s'adressait à Dieu, se met à crier d'une voix forte: "Maintenant tu peux faire claquer tes fouets!"
Il venait à peine de crier ces derniers mots qu'un éclair est venu le foudroyer sans toucher son compagnon qui, apeuré, attend la fin de l'orage pour descendre en courant au village raconter le malheur et chercher d l'aide pour ramener le corps de Gal.
Bien des gens, sans le dire ouvertement, pensèrent qu'il n'en méritait pas plus... et les "Rouges" se sont calmés.
pauvre monsieur, pour manger c'est épais..."

Nouvelle boisson

Au dédut de notre siècle (le XXe), le café n'était pas connu à Peisey. Un été, un Peiserot qui vivait à Paris eut l'idée de ramener chez une cousine un peu de café en grains, ainsi qu'un moulin à café pour le moudre. Il voulait lui faire connaître et goûter cette nouvelle boisson.
Arrivé chez elle, il l'embrasse et lui dit: "Bonjour cousine, je t'apporte de beaux grains noirs et un petit moulin pour les moudre. Avec cette poudre, tu pourras faire une bonne boisson qui te donnera du courage et l'envie de chanter. Je vais te dire comment il faut la préparer.
Pendant que tu mouds les grains, mets de l'eau dans une petite marmite sur le fourneau et laisse-là bouillir. Ensuite, verse un verre de cette poudre dans l'eau bouillante. Remets le couvercle à la marmite et laisse reposer un grand moment (vingt minutes)".
Au bout de ce temps, elle prend son écuelle sur les étagères et, avec une petite louche, remplit l'écuelle de ce jus noir. Elle ajoute deux sucres, brasse un peu et se met à boire. " Je n'ai jamais bu aussi bon" dit-elle à son cousin. Et lui dit: "Je suis content que cela t'ait plu mais je vais dehors faire pipi".
Elle pense que si le jus était si bon, la poudre qui avait servi devait être meilleure et sûrement au fond de la marmite. Alors, elle vide doucement dans une casserole pour ne laisser que l'épais. Elle prend alors sa cuillère, puise au fond et porte à la bouche.
Elle fait des grimaces et crache par terre en disant: "Un si bon jus, une si bonne boisson, mais ,mon pauvre monsieur, pour manger c'est épais..."

Premier voyage en train

En 1913, le train est venu pour la première fois à Bourg-Saint-Maurice, et pour nous Peyserots, la gare était à Landry. Pour le marché le samedi ou pour une foire, les anciens voulaient aller en train pour voir cette nouvelle machine et pour aller plus vite qu'à pied. C'est pour cela que Joseph et Marguerite (60 ans bien sonnés) sont descendus de Peysei par la grand raccourci (une heure de chemin). Arrivés au village de Landry, ils demandent: "Où est la gare du train?" Une femme leur dit: "Au fond du plateau, un peu avant le pont du Péré (le pont de la Pierre), à un quart d'heure d'ici; c'est une maison toute seule." Arrivés à cette maison, ils voient une grande porte, la poussent et entrent; il y a une grande pièce et, derrière un carreau, un homme qui leur demande en patois en les voyant: "Yeu vouèdè̱vo alo?" (Où voulez-vous aller?). Joseph lui dit: "A Bourg". Le chef prépare le billet, le lui tend et lui dit: "Ça fait 10 sous."
Joseph, qui se croyait à la foire, répond: "C'est trop cher, ça ne vaut pas plus de 8 sous." "C'est le prix fixé, dit le chef, je ne peux pas faire moins. "
Joseph insiste, et le chef essie de lui faire comprendre. A ce moment, le train siffle en arrivant en gare. Joseph, surpris, crie: "Siffle, siffle pas, je ne te donne pas un sou de plus". Joseph donne 8 sous et prend le billet. Le chef leur dit: "Suivez-moi dehors." Une fois sur le quai, il leur dit: "Regardez là-bas. D'un côté c'est écrit "homme" et en face "dame". Il faut vous séparer et aller chacun de votre côté."
Ils rentre, et un petit moment après, le train démarre en faisant beaucoup de bruit. Joseph pense qu'en roulant, ça bouge tout. Au bout d'un moment, comme rien ne bougeait, il crie par-dessus la murette de séparation: "Eu, Guita, bu̱dzè-ti a tè? A mè i bu̱dzè po!" (Hé, Marguerite, ça bouge-ti, à toi? A moi ça bouge pas!".
Payer 8 sous pour aller aux WC de la gare... Joseph s'en est souvenu toute sa vie.

Visages d'autrefois

Dans mon village, près de chez nous, vivait un vieux garçon de plus de 60 ans, nommé Claude Maurice. Pour n'être pas seul, il avait trouvé dans une commune voisine une vieille fille du même âge, seule et sans famille.
Il en avait fait sa servante sans salaire; il lui fournissait le logement et la nourriture. D'un caractère simple, ils s'entendaient bien. Les jeunes du village leur avaient donné à chacun un surnom. Lui était "Saucisse", sans motif connu; elle,était la "békouui̱na" à Claude Maurice, mais souvent, ils lui disaient "Tètèt", à cause de ses gros seins comme les pis d'une vache.
Elle se fâchait lorsque quelqu'un disait de leur vache qu'elle avait une belle têtine; il fallait dire "un beau dessous".

En 1925, Claude Maurice n'avait pas voulu se faire installer l'eau et l'électricité à la maison. Il appréhendait l'inondation suite à une fuite, et l'incendie de sa maison par des fils mal isolés. Il prenait l'eau au bachal devant chez lui, et s'y débarbouillait tous les matins, hiver comme été. Pour s'éclairer, il allumait la petite lampe à pétrole nommé "kreuju". Les jeunes gens se plaisaient à venir l'agacer en l'appelant dehors. Ils disaient: "Hé! Saucisse! Tu la sors, la môme?" L'hiver, ils lui lançaient des boules de neige sur son chapeau; l'été, ils l'arrosaient avec l'eau du bachal.
Un jour, il voulut se venger,des deux fils de l'épicière, qui étaient les plus terribles. Cette femme était la fille de celle qu'il avait voulu épouser mais qui, au dernier moment, n'avait pas voulu de lui.
Il alla donc au magasin et demanda un kilo de saucisses. Surpris de sa demande, elle pèse quand même les saucisses et les lui présente en disant le prix. Claude Maurice se met à rire et lui dit: "Eh bien maintenant, donne-les à manger à tes garçons qui viennent souvent m'en réclamer!"
Tout heureux de son coup, il sortit en riant.

Les ennuis du chat de chez le "Courrier"*

Autrefois, il se passait des choses drôles que les anciens appelaient "magie".
Ma femme et moi avons été sans le vouloir témoins d'un de ces faits. Début juin 1947, nous étions installés à la Montagnette. Deux jours après, nos voisins arrivaient avec leurs bagages sur la charrette à mulet. Il y avait Alphonse, Angèle et leur fille Jeanne. Selon la coutume, le chat de la maison était dans un sac en toile de jute qu'on ouvrait à l'arrivée en premier. Jeanne ouvre le sac, mais oh! Surprise, le chat ne peut se séparer du sac, il est collé au sac par les poils du dos. Jeanne, choquée, appelle son père et sa mère.
Angèle vient et demande à Alphonse: "Qui as-tu vu en arrivant au village?" Il répond: "J'ai vu de près la femme de Jean." Angèle se doute de quelque chose et leur dit: "Rangez à la maison les bagages, en attendant que je prépare ce qu'il faut pour pour délivrer le chat et dresser cette bonne femme. Elle rentre au chalet, allume un bon feu et fait rougir le pique-feu. Une fois bien rouge, elle dit à Jeanne et à ma femme: "Tenez une le chat et l'autre le sac. Puis elle passe le fer rouge entre le sac et le dos du chat. Aussitôt le chat s'échappe, mais rien n'est roussi, ni le sac, ni les poils du dos du chat.
Angèle nous: "Demain, tâchez de voir la femme de Jean quand elle sortira de chez elle. Nous l'avons surveillée et nous avons vu qu'elle avait le visage enveloppé d'un bandeau.
Nous lui avons dmandé ce qu'elle avait et elle nous a dit: "Je me suis brûlée près du feu en tombant".
Angèle nous a dit peu après: "Espérons que la leçon sera bonne."

*Le Courrier: sobriquet de celui qui distribue les lettres.


La grande journée de l'inalpage

Le jour de l'inalpage, c'est-à-dire où nous menons les bêtes en montagne pour trois mois de vacances, il fallait se lever très tôt avnat le jour pour pouvoir partir vers les quatre heures et demie du matin de Plan-Peisey, après leur avoir tiré le lait et passé de l'huile sur l'échine.
Après une heure de marche, tout de nuit, on arrivait au village des Lanches où on nous attendait. On formait un gros troupeau d'environ cinquante vaches, et on le partageait par groupes de huit ou dix.
En général, à la pointe du jour, cinq heure du matin, on repartait et on allait sans s'arrêter jusqu'au rocher des Mendières, juste au-dessus du lac de la Plagne. C'était huit heures, le soleil était levé, on s'arrêtait pour faire manger les vaches et nous pour casser la croûte. Quand tout s'était bien "assisté", on reprenait le sentier vers le Plan de la Grasse pendant une demie-heure.
A cette date-là, le Plan de la Grasse était un grand lac avec un mètre d'eau sur un kilomètre; il fallait alors suivre l'arête jusqu'au bout: quand il y avait encore de la glace sur le lac, il arrivait que les vaches s'y dirigent, la glace cassait, et elles étaient obligées de nager un bon moment entre deux bancs de glace. Au bout du plan, on prenait une grande montée raide où il n'y avait plus de neige sur le sentier; ça allait vraiment tout doux pendant une demi-heure. Au bout de ce temps, il y avait puis la traversée du Col de la Tourne qui durait une demi-heure; c'était bien dégagé et dans les petits creux les névés* étaient durs. Au bout du col, il y avait toujours un grand névé d'à-peu-près quatre mètres de long. Si cette nuit-là c'était gelé, les vaches passaient bien, mais s'il avait fait doux, elles s'enfonçaient, et quelquefois jusqu'au ventre.
Il fallait alors leur passer une corde autour du cou et exciter le chien derrière pour les faire mordre, et on tirait avec la corde pour les aider.
Au bout du grand névé, avant de prendre la descente sur Tignes, il fallait faire passer les vaches une par une sur cinquante mètres dans une grande pente pour qu'elles ne lugent pas pas 200 mètres plus bas dans un creux. Ce mauvais passage s'appelait "la Grapillon"*. Maintenant, ils ont créé une piste de ski bien large. Après la descente de Grapillon, la terre commençait à verdir et on arrivait au chalet du berger des moutons. Ces moutons du Midi (environ deux mille) passaient l'été sur des terrains communaux.
A ce moment-là, on partageait le troupeau d'après l'alpage où chacun allait; ceux du Marais partait à gauche, ceux du Bec-Rouge tout droit en bas, ceux du Lac et des Barmes à droite.
Arrivés en bas dans le joli vallon de Tignes, nous étions bien reçu par l'alpagiste, nous cassions la croûte, nous buvions une écuellée de lait et nous nous reposions.
L'après-midi nous reprenions la montée pour revenir chez nous par le même chemin et vers les six heures nous étions à la maison.
Journée fatiguante mais agréable, et bien des choses à raconter.

*Névé:épaisseur de neige qui reste sur une petite partie de terrain où va bientôt pousser l'herbe.
*Grapillon: partie très raide de terre ou de rocher où il faut s'accrocher pour monter.



Histoires maintes fois racontées et publiées dans la Revue Dava Rossan-na en français et en patois sous le nom d'auteur Dona Revène – Le Marmotïn – Moulïn - Péjèy




DONAT


C'est un bon paysan
De la vallée voisine
Derrière le Mont Pourri
Au hameau des Moulins
Au bord du Ponturin
Il aime sa vallée
Et la veut conserver
Telle que Dieu l'a bien faite.

Toute sa vie durant
Presque quatre-vingt ans
Il l'a bien parcourue
Sa vallée bien aimée
D'abord de son mulet
Puis son petit tracteur.

Un très bel équipage
Tandis que Marcelline
Sur sa remorque assise
Se retient par la main
A la grande ridelle
Pour bien se prémunir
Des chaos du chemin.

Pour le seize juillet
Au plus beau de l'été
Ils montent aux Vernettes
A la vierge Marie
Faire leurs dévotions
Et boire l'eau bénite
Au grand pèlerinage
De la source Baudin.

Pour garder la mémoire
Des gens de son village
Donat a dans la tête
Et aussi ses cahiers
Un autre grand projet
Ecrire et conserver
Son patois séculaire
Afin que dans les temps
Où tout s'uniformise
Les expressions et mots
Du patois Peyserot
Puisse encore s'exprimer
En des H aspirés
Tout comme dans ce chiffre
Hïn mili hïn hè
Hin kanté hïn
(Cinq mille cin cent cinquante-cinq)

Le 12 septembre 1998


José REYMOND, Poésies au sommet (1999)
© Editions l'Edelweiss



Donat, ses écrits!


Peisey et ses origines:

La vallée de Peisey est une ancienne vallée glacière dite en U par sa forme. Son accès a toujours été difficile depuis Landry. Il n'y avait qu'un sentier de largeur moyenne (de 1 à 2 m) appelé le " le Grand Raccourci ". La route actuelle date de 1900 et elle a été élargie à deux reprises. Plus tard fut construite celle de Peisey à Nancroix et enfin,en 1972, celle de Nancroix à Rosuel.
Primitivement la vallée était habitée par les Ceutrons, population locale d'origine celtique puis vinrent se mélanger les Burgondes et même les Sarasins (GONTHARET et RICHERMOZ).
Le christianisme est apparu en Tarentaise vers le 5ème siècle et la paroisse de Peisey a bénéficié de dons de Charlemagne comme sa voisine vers 810.
Peisey et Nancroix sont deux villages distincts. Mais le nom de Nancroix a été rajouté du temps où le maire y habitait. Ce lieu était déjà connu pour son tourisme d'été, car il était idéal comme point de départ des promenades. Pour faire de la publicité, le maire décida d'accoler les deux noms.
Le mot Peisey vient du latin " Pesetum " qui veut dire " sapin rouge ". Il est certain qu'autrefois, la différence n'avait pas été faite, de façon correcte, entre l'épicéa (= le sapin) et le mélèze. Les deux mots étaient englobées dans le même ensemble, dans l'esprit des gens de cette époque. Comme le mélèze est un bois rouge à l'intérieur (contrairement au sapin qui est un bois complètement blanc) et qu'à Peisey, il est très répandu, cette appélation est donc celle-ci.

Le mot Nancroix signifie " petit nan "(Nancruet). Le nan est un ruisseau. Ici, il s'agit du Poncet qui descend entre l'Aiguille Rousse et l'Aiguille Grive, il traverse le village.

L'école et les jeux:

Pour la plupart des enfants, l'année scolaire débutait après la Toussaint et se terminait fin Mai. Lorsque que les parents étaient dans les montagnettes avec le bétail (de Juin à octobre), c'était trop loin. Pas de vacances en Février mais cinq jours de classe par semaine et pas de sport. Pas de maternelle non plus, l'école débutait à sept ans. Après le Certificat d'Etudes (11 ou 12 ans) c'était fini. Rares étaient ceux que les parents pouvaient envoyer en pension au Collège.
A l'école les jeux étaient le jeux de billes, le chat perché et la toquette. Dans les villages, c'était le jeu de cache-cache. A la maison, pour tout le monde, il y avait le jeu de cartes, le jeu de dames, les dominos, le nain jaune et parfois la " moura " (jeu du Val d'Aoste). En hiver sur la route et dans les ruelles, c'était la luge.

Le tourisme à Peisey avant 1920:

Vers la fin du siècle dernier la vallée avait attiré des gens fortunés de Chambéry et de Lyon qui venaient en diligence jusqu'à Bellentre et que des jeunes de Peisey allaient chercher à dos de mulet pour les monter dans les alpages vers le lac de la Plagne et le col du Palet.
Un refuge était ouvert à Nancroix chez SILVIN Claude pour les recevoir. Ce refuge devint plus tard, vers 1930, l'hôtel du " Chamois fidèle ". L'alpinisme débuta vers 1861. Le Mont Pourri fut escaladé par le glacier par un anglais Winper accompagné par un guide local CROZ. En 1873 un Peiserot POCCARD Joseph l'escalada par le rocher côté sud. Cette voie fut appelée " chemin Poccard "; elle n'est plus utilisée. Le premier guide fut Jean ROUX; il y eut ensuite Gaspard BURATTI, Francis TRESALLET, André RICHERMOZ et Maurice COUTIN.

Le tourisme à Peisey depuis 1920:

Après la Grande guerre plusieurs peiserots transformèrent leurs maisons d'agriculteurs en petits hôtels qu'ils agrandirent après 1930 lorsque le ski commença. L'arrivée du train à Bourg-Saint-Maurice en 1913 favorisa la clientèle aisée de Paris. Les émigrés de Peisey à Paris spécialisés dans le bronze d'art en faisaient la publicité. Puis fut crée un Syndicat d'Initiative pour faire connaître notre vallée.
Vers 1930 des prêtres de l'Ain achetèrent des chalets d'alpage aux Lanches et à Rosuel et amenèrent des groupes de jeunes et des scouts. Ce fut le début de la clientèle populaire. Plus tard fut construite la première Maison Familiale appelée " le Bon Air ". En 1932 par une délibération du Conseil Munucipal le nom de Nancroix fut ajouté à celui de Peisey dans un but de publicité touristique comme Bourg-St-Maurice-les Arcs ou Aime-la Plagne.
En 1936 des moniteurs de ski autrichiens vinrent former des jeunes de Peisey comme moniteurs. Chaque année en février le concours de ski local était une grande fête (ski, saut,luge,bob, théâtre).
Le développement du ski déclencha le besoin de remontées mécaniques. En 1948, un hôtelier de Peisey fit construire le premier téléski-télésiège pour relier le village de Peisey à 1300 m au domaine skiable de Plan-Peisey à 1700 m. Plus tard, il construisit un téléski dans la forêt jusqu'à 1850 m ce qui permit à un autre hôtelier de Peisey de construire aux Michailles sur Landry à 1650 m un hôtel de taille moyenne appelé " le Mont-Blanc ". Ces remontées mécaniques fonctionnèrent jusqu'en 1963. A cette date, la commune prit les choses en main sous la forme d'une Régie Municipale. Le projet de la station de Plan-Peisey démarra la même année que la Régie. Ce furent d'abord des chalets individuels puis deux immeubles: l'un collectif, l'autre individuel. Puis vint le centre commercial et plusieurs autres immeubles. Enfin vers 1972 fut construit un hôtel " la Vanoise ".
Un autre secteur, celui du village de Baudet, fut crée plus tard et permit un rapprochement avec la station de Vallandry qui démarrait. Les deux stations sont maintenant associées, l'école de ski et l'office de tourisme sont communs. Les remontées mécaniques sont gérées par la STAG (Société des remontées Mécaniques de l'Aiguille Grive). Le Vanoise Express entre Plan-Peisey et Montchavin permet la liaison entre les Arcs et La Plagne( domaine du Paradiski).


L'agriculture avant le remembrement de 1970:

Depuis toujours c'était une agriculture de subsistance. Elle était complétée par une activité artisanale importante (travail du bois, du fer, du cuir, de la pierre et de 1730 à 1860 les mines de plomb-argentifère). A partir de 1942, il y eut les mines de charbon.
La culture du seigle et de la pomme de terre était importante. L'élevage des bovins et la production de lait étaient suffisantes pour la nourriture (lait, beurre, fromage et sérac). La vente des bovins (veaux gras, vaches) apportait de l'argent frais pour les achats courants. Comme légumes dans le jardin, on cultivait les fèves, les haricots, les raves, les carottes, les petits pois et les poireaux. Il y avait quelques pruniers, les framboises et les myrtilles poussaient beaucoup dans les bois.
Chaque famille engraissait des cochons pour la viande. A signaler que l'été, on gardait des chèvres pour avoir du lait frais. Les produits de la chasse (chamois, marmottes, lièvres) complétaient parfois le menu ordinaire.
Pendant les 6 mois que durait la mauvaise saison (de novembre à fin avril) chaque village vivait un peu sur lui-même et les familles avaient des relations de vie commune importantes. D'abord la fromagerie (la fruitière) où on se retrouvait matin et soir, puis les veillées très fréquentes le soir et même l'après-midi. Les nouvelles circulaient bien. La gaieté était de mise grâce aux chansons, à l'harmonica et aux farces (plaisanteries).

La vie agricole avant le remembrement de 1970:

La vie des agriculteurs de montagne autrefois est caractérisée par de nombreux changements de domicile au cours de la belle saison(de fin Mai à Décembre). De Noël à Mai, c'est au village principal que gens et bêtes séjournent( les bêtes sont à l'étable). Fin Mai avec le troupeau, nous montons dans les montagnettes pour les pâturages de printemps. Fin Juin, les bêtes partent en alpage pour trois mois; nous, nous redescendons au village pour faire les foins. Fin Juillet, nous coupons le seigle et remontons dans les montagnettes pour y faire les foins. Vers la fin Août, nous redescendons au village pour faire les refoins (regains), arracher les pommes de terre, faire la feuille pour les chèvre et débarrasser le fumier du creux de culture. Fin septembre, lorsque le bétail revient d'alpage, nous remontons dans les montagnettes pour les pâturages d'automne. Fin octobre, nous redescendons, soit au village, soit dans d'autres montagnettes bien exposées au soleil ou nous emmagasinons le foin pour y rester jusque vers Noël. Donc 6 ou 7 " tramages"  (changement de domicile).
Depuis 1980 grâce au remembrement et aux facilités de déplacement (voitures, tracteurs), plusieurs gros agriculteurs se contentent de deux ou trois tramages.

Les travaux agricoles:

Il y avait plusieurs travaux importants:
les labours et les semailles surtout au printemps,
les foins et les regains de fin juin à fin septembre,
la moisson du seigle et de l'orge en août puis battage au fléau en décembre,
la récolte des pommes de terre en septembre et octobre,
l'épandage du fumier et enfin l'exploitation du bois en forêt communale et dans les bois privés pour le chauffage.
Pour le labour, c'était surtout les mulets qui tiraient la charrue et parfois on les accouplait.
Au début, la charrue n'avait qu'un soc puis vint la charrue à deux socs réversibles ( la brabanette).
Pour les semailles, c'était le seigle à l'automne et au printemps, c'était l'orge, l'avoine et les pommes de terre. Le fauchage des foins se faisait tout à la faux et surtout de bon matin jusqu'à l'arrivée du soleil. Les premières moto faucheuses apparurent vers 1950; ce fut un événement. Le ramassage du foin sec se faisait en bottes rondes appelées " barillons ". Une fois rentrées à la grange, on les ouvrait et on étalait le foin en couches successives puis on le salait pour la conservation. S'il n'était pas assez sec, on le montait au séchoir (le solan) quelques jours. La moisson se faisait aussi à la faux et les gerbes étaient assemblées par quatre pour qu'elles sèchent debout dans le champ. Le battage se faisait au fléau par deux personnes en même temps. L'arrachage des pommes de terre se faisait soit à la pioche seule, soit à la charrue. Le transport du fumier se faisait soit au tombereau sur les terrains plats, soit à dos de mulet dans un sac double appelé "batsoulè " pour les terrains pentus et quelquefois l'hiver en traîneau à neige.
L'exploitation du bois de chauffage et bois pour faire des planches se faisait à la hache et à la grande scie double appelée " leuva ". L'apparition de la tronçonneuse fut aussi un soulagement.


L'habillement:

Pour les hommes, les vestes étaient fréquemment en drap de Séez ainsi que les pantalons. Plus tard vint le velours côtelé. Il y avait aussi une veste en moleskine bleue ou noire, c'était le " telïn). Les bas étaient en laine tricotée à la main, les chaussettes en coton arrivèrent plus tard. Les chemises étaient parfois en toile écrue. Le béret et le chapeau étaient la coiffure habituelle. Pour l'hiver, il y avait le bonnet en laine et le passe-montagne, la casquette était rare.
Pour les femmes, il y avait d'abord la grande robe noire en draperie recouverte d'un tablier légèrement coloré. Puis vint la blouse de différentes couleurs. Le corsage en lainage s'appelait le caraco.Sur la tête à l'arrière, les longs cheveux étaient enroulés dans une tresse appelée " la couèche ". Sur la tête et le front était posée " la frontière " à trois pointes garnie de beaux rubans. Le costume de fête comprenait en plus sur le buste " le plastron et la modestie " et sur la couèche étaient fixées les " cordettes". Pour couvrir les épaules et le dos était fixé un grand châle brodé de beaux dessins.


L'alimentation quotidienne:

Le pain quotidien était le pain de seigle cultivé au pays et cuit dans le four communal. Le pain de froment (appelé couronne à cause de sa forme) était le gâteau des dimanches et des jours de fêtes. La pomme de terre était présente sous différentes formes presque tous les jours. Avant l'arrivée du café, la soupe de légumes était là matin et soir. Il y avait dedans des pommes de terre, des carottes, des raves, des fèves de la viande ou du lard.
Les fromages ( tomme ou gruyère) étaient consommés presque tous les jours car comme disait un ancien: " le fromage est l'acier de l'homme ". Le sérac, sous produit du sérum du lait, était apprécié surtout à l'automne avec les pommes de terre nouvelles. Un plat courant, c'était la polenta surtout en alpage.
Les bugnes (ou bougnettes) sous différentes formes (tendres ou sèches) étaient et sont encore un régal. Enfin, un gâteau spécial du pays, cuit au moulin par le boulanger de l'époque, était fabriqué à chaque grande fête religieuse. Il contenait de la farine, des oeufs, du beurre, de l'anis ou du safran et pesait environ 800 grammes. On l'appelait la " crèchène ".

Les fêtes religieuses:

A Noël et à Pâques, c'est la messe de minuit qui est la plus animée et suivie. A Noël, elle est précédée d'une veillée en famille ou entre voisins. Le tirage des Rois début janvier a souvent lieu par village ou par quartier.
Pendant la messe de minuit de Pâques, une équipe de jeunes du pays allait récupérer beaucoup d'engins agricoles restés hors des maisons: tombereaux, charrettes,échelles,civières, brouettes, planchers des veaux. Ils les transportaient sur la place du village. C'était une véritable exposition agricole. Les jours suivants les propriétaires allaient les récupérer dans la bonne humeur.
Le 16 juillet, c'était le grand pèlerinage de la Haute-Tarentaise (les deux cantons de Aime et Bourg-St-Maurice) à Notre-Dame des Vernettes. Certains y venaient à pied des communes voisines. On buvait, on se lavait les mains et le visage à la source miraculeuse. Après la grand messe et la procession à la petite chapelle, c'était le grand pique-nique en commun dans la cour ou autour de la chapelle. L'évêque ou son délégué venait présider cette fête.
Le 15 août pour la grand-messe et la procession à la Croix de Marmarin. Les femmes et les jeunes filles sortaient leurs beaux costumes de tarines (les frontières). En 1947 eut lieu l'élection de la Reine de Peisey et ses deux demoiselles d'honneur. Le choix était fait par un jury qui jugeait d'après la qualité du costume et la façon de le porter. Son règne dura cinquante ans; maintenant elle est renouvelée chaque année.

Les fêtes civiles:

Le passage d'une année sur l'autre (le 31 décembre) était toujours fêté par le bal des conscrits: c'est-à-dire les jeunes qui allaient avoir 20 ans au 1er janvier. La semaine précédente, il fallait porter la cocarde à leurs conscrites, chez elles, à la veillée. Selon le nombre de consrites, c'était plusieurs soirées de gaieté. Dès la matinée du 1er de l'an après le bal de la veille, les conscrits parcourraient les villages avec le drapeau en battant du tambour. C'était l'occasion de leur payer à boire, parfois à manger.
Le Mardi-Gras était la fête des Masques. Bien camouflés sous leur déguisement, les jeunes allaient de maison en maison en faisant du tapage pour faire peur aux gosses, avec bâtons et fouets. Ils demandaient un peu d'argent pour faire la fête le soir, des oeufs et du chocolat étaient les bienvenus pour cela.
Le 24 juin avaient lieu les feux de joie de la Saint-Jean (les zébés) qui marquaient le début de l'été. Il fallait aller couper des petits mélèzes dans les terrains communaux, les jours précédents. Ce jour là, on les dressait côte à côte en pointu sur une botte de paille au milieu du village des Lanches. A la tombée de la nuit, on y mettait le feu et le bal pouvait commencer autour du feu au son de l'accordéon.
Le jour du concours de ski local en février (concours de ski de fond, de luge, de bob,et de saut) et après la distribution des prix à tous les concurrents, il y avait parfois un petit théâtre et pour finir un grand bal.

Les mines:

Dans la vallée de Peisey, il y a eu deux sortes de mines.
D'abord, il y eu le filon de plomb-argentifère découvert vers 1720. L'exploitation fut importante de 1800 jusque vers 1860. Napoléon y créa " l'Ecole Pratique des Mines de France ". IL en reste un grand bâtiment au bout d'une allée de mélèze. On l'appelle " le Palais des Mines ". Des visites guidées ont lieu à la saison d'été. C'est le même filon que celui de la Plagne à Macôt.
Au milieu du XIXe siècle, quand l'agriculteur et l'élevage ne suffisaient pas, et pour subvenir à leurs besoins, les Peiserots, soit immigraient à Paris, soit " vendaient " leurs bras pour l'exploitation des mines. Ce fut une entreprise très prospère (puisqu'elle dura plus de deux siècles), et l'espoir d'une vie économique meilleure.
Malgré l'isolement du village, les ouvriers y venaient de toutes parts pour renflouer leurs maigres revenus. L'accès à Peisey (par Landry) se trouvait très hardu et n'était possible que grâce à des chevaux habitués aux chemins escarpés et très longs de la montagne. Pendant leur périodes de travail, les ouvriers vivaient repliés sur eux-mêmes: aucune communication n'était possible avec les autres bourgs.
L'extraction du minerai signifait un effort de longue haleine. Une dure formation devait être suivie et de ce fait, on ne commençait pas avant la trentaine. A la " retraite " forcée (cinquante ans), les mineurs pouvaient espérer une embauche à la fonderie de Conflans.
Ces ouvriers de la fosse forçait le respect de la part des autres travailleurs car la mine ne leur donnait que difficultés et dangers à surmonter.
L'exploitation était menée de façon grossière. Dès qu'un filon s'amanuisait, on fermait la galerie pour en amorcer un autre plus riche.
L'horreur du gouffre se traduisait par l'humidité constante et les explosions inattendues. Il n'était pas rare de rencontrer des hommes aveugles et mutilés. Les pieds dans l'eau, la première équipe commençait à quatre heures du matin jusqu'à midi, puis une deuxième équipe les relayait pour finir à huit heures du soir.
En moyenne, sur 900 kilos de matière abattue, seulement 170 correspondaient à l'attente des connaisseurs: c'est-à-dire le plomb.
Dehors, on déchargeait les chariots, concassait les blocs de minerai avec des masses. Femmes et enfants triaient les débris, sous le froid de l'hiver (" saison " du travail aux mines) dont la rigueur des températures étaient telle qu'elle gelait le torrent et stoppait les boccards. Souvent, les matériaux sortis attendaient l'été pour se faire traiter.
On y employait aussi des enfants pour de petits services, même au fond des galeries, surtout pour les habituer aux dangers et donc en faire plus tard d'habiles mineurs " sans peur et sans reproche ".
Le travail était dur et mal payé. Mais à part quelques soubresauts de mécontentement, il n'y eu pas de véritables grèves.
On ne recourait pas non plus au licenciement car on savait l'importance de cet emploi pour ces hommes.
Ils étaient courageux et travailleurs, s'efforçant d'améliorer leur vie sociale; ils étaient l'exemple d'un espoir économique dans la vallée.

Ensuite, les mines de charbon (anthracite) exploitées du côté gauche de la vallée au lieu-dit " la Corbassière " en aval du Chanton pendant le 19ème siècle et au début du 20ème siècle , puis les mines du Villaret sous le chef-lieu de Peisey depuis 1940 jusqu'en 1970.

Le Parc National de la Vanoise:

Il fut crée en 1963 dans le but de protéger les animaux sauvages de la montagne ainsi que les plantes et fleurs rares. Nous avions déjà le chamois et la marmotte, on y ramena des mouflons (une douzaine) mais ils n'y restèrent pas et allèrent à Champagny et y restèrent. Les plantes protégées sont l'edelweiss, le lys martagon, le génépi, etc.
Après le remembrement en 1971, fut construite depuis le pont Baudin, la route d'accès au Parc. Elle fut suivie du refuge de Rosuel. Ce fut la première porte du Parc. Sur le territoire de Peisey, 2000 hectares d'alpages font partie du Parc National de la Vanoise. La création de ce parc ne gena en rien l'exploitation des alpages de génisses mais le sentier d'accès est peu entretenu malgré le grand nombre de touriste qui le fréquentent. A signaler deux refuges bien entretenus, celui du Mont-Pourri et celui d'Entre-Lac au bord du lac de la Plagne.

Le Patois de Peisey:
 Ou encore: le patouè dè Pèjey.

Il semble qu'il soit un peu unique puisque la graphie de Conflans n'a pas pu retranscrire deux sons. Ce qui est assez incroyable, c'est que le même langage est utilisé de l'autre côté de la frontière: à Val Tournanche, au pied du Cervin, dans le Val d'Aoste (Italie).
La graphie de Conflans permet de lire et écrire les parlers franco-provençaux tout en respectant les particularités de chaque région. Il s'agit d'une écriture phonétique exposée dans les cahiers de Conflans en 1983.
Elle suit certains principes:
Utiliser le plus possible les conventions graphiques du français pour ne pas dérouter les lecteurs.
N'écrire que les sons qui se prononcent.
Adopter des conventions claires et commodes pour rendre possible deux choses qui peuvent paraître contradictoires: la lecteure courante et la reconnaissance précise des sons.
Ecrire la forme patoise telle qu'elle est dans la commune de celui qui parle ou écrit. La graphie doit, comme le discours parlé, permettre de situer le patois à l'intérieur de la Savoie.
Trouver des signes qui existenr sur le clavier des machines à écrire ou ordinateurs.











Premier contact


Rencontrer Donat Silvin relève d'une aventure plaisante. Il faut tout d'abord le chercher au bon endroit, au bon moment car en fonction de la saison, il change aussi de maison.
Mais cet aprè-midi du 7 novembre, je n'ai eu aucune difficulté à le trouver à Moulins.
Monsieur Silvin est sans doute le personnage idéal pour le travail que j'avais à lui demander: c'est-à-dire me parler en patois.
Je le connaissais déjà et je savais qu'il avait les souvenirs intacts, l'humour, l'amour de son parler qui m'étaient indispensables pour la tâche que j'avais à faire. (Il élabore actuellement un dictionnaire du lexique de Peisey).

Je poussais donc la porte pour arriver dans un couloir qui donnait sur un autre qui annonçait mon arrivée par un son de cloche lorsque je l'avais franchie. Enfin, je posais le pied timide dans la cuisine; l'accueil de Monsieur Silvin fit disparaître mon appréhension.
Il se trouvait au côté de sa femme qui conversait avec une amie en utilisant le langage dont j'étais tellement curieuse d'entendre les mots.
Je pus enfin lui expliquer les motifs de ma visite.

Surpris d'abord de voir que je m'intéressais au patois de Peisey, il se plia avec plaisir à mes demandes en répondant plus spécialement à la question suivante: " racontez-moi en patois, une journée bien particulière pour vous. Quelle est à vos yeux la journée la plus importante de l'année? "

© "Langue et culture de PEISEY-NANCROIX"
VERNAY Laurence,
étudiante en Licence de Sciences du langage,
Année 1993/94